“When Hollande encourages water privatization in Greece” is the title of the article of the french magazine Basta, which is the first to publish the Greek water movement’s open letter addressed to the french people.
Here follows the letter in english and french.
Les tyrans ont toujours quelque ombre de vertu Ils soutiennent les lois avant de les abattre
Voltaire
(Tyrants have always some slight shade of virtue; they support the laws before destroying them.)
Frenchmen, our brothers!
On the 19th of February, your President, François Hollande, visited the capital of our country, Athens. “Our message to Greece is a message of friendship, support, trust and growth” stated your President and asked the French corporations to invest… to invest in land and water.
Hollande and Samaras (Greek PM) talk about “investments” in the sector of water resources management, resources which are protected by the Greek Constitution, and belong to none, nor the Prime minister, to trade them in.
We are very well acquainted with your struggle to protect the social and common goods and your sensitivity to water management. After years of private management and despite the fact that the two bigger players, Suez and Veolia are of French interests, Paris, Brest, Varage, Durance-Luberon, Castres, Cherbourg, Toulouse and others vindicated and succeeded to return water into public hands. And they did so after they experienced the consequences of water commercialization, the surge in water prices, the inequality in access to water services, the reduced investments in network maintenance and expansion and the monopoly practices. Even though in Greece the citizens have forgotten the distant era of 1925, result of the international audit of that time, where water in Athens was at the hands of the American Ulen, the younger of us, by reading and studying, we share with you the exact same worries for the forthcoming privatization of EYDAP and EYATH (Athens and Thessaloniki water companies) and other, as the rumor has it, municipal services.
And our agony gets intensified and transformed in rage, when we read the answer of Oli Rehn’ Directorate to the civil society groups that confirms that the European Commission intensively pushes for the privatization in all troubled countries that receive loans, despite the fact that this is directly opposite to the Directive for neutrality when it comes to public or private property of water services management (article 345 TFEU and article 171 Directive 2006/123/EC on internal market services) but also on the Protocol on Public Services of the Treaty. At the same time, the Commission and the Greek government ignore to their knowledge the fact that it is the Commission itself that conducts a research on Suez Veolia and Saur monopolistic practices and practices of conduct harmonization.
In this country therefore, in the brink of default, that loses daily its sovereignty and independence and where citizens’ voices and reactions against the colonial sell-off of its natural resources are drowned under the dogma of “zero tolerance”, the Greek government, that stole the Greeks’ vote to “renegotiate” the memorandum, thinks it is urgent to cash in with anything that can be sold, and it seems they have for sale not only its heritage but also a part of its soul. We, the Greek citizens, return humiliated to an era of protectorate, forced to privatize our water, which will become thus not safe and expensive.
After the grand Italian referendum for the water on 2011, the remunicipalization in many French cities, the legislating from the Netherlands in 2004 of compulsory public management of water services and the existing protection of water in the German Constitution, we cannot help but wonder: Does the EU still considers us Europeans? And we are sad, exactly because we are indeed Europeans, not only for us, but for the event that we will become, against our will, the Trojan horse for the creation of a water market everywhere in Europe. We know that the French people will become not a euro richer, even if French water corporations expanded their action to the last of our islands and that is why call on you to stand on our side. We do not want such “investments” that mean privatization of profits and socialization of costs, which will hold our country indebted for eternity.
We want to shout at you with all the power of our souls that water privatization in Greece is a matter of all Europeans that have for many years now resisted vigorously the commercialization of water services. It is a step backward in our common struggle for commons and human life. For all of us, water is more than a common good, it’s a symbol of justice and freedom, a collective heritage that we have the duty to safeguard and deliver safe and free to the next generation.
In conclusion, Greece’s destiny is also Europe’s destiny, a Europe behaving as an undemocratic oligarchy, installing a new type of feudarchy of the 21st century, where decision making is reserved for the market lobbies.
Frenchmen, our brothers, we the Greek citizens ask you to stand on our side on this struggle for the democratic management of our water resources, against a troika that decides and commands and a government enchained, sometimes to its pleasure, to the memorandum clauses. It is time we give together a new impetus to the triptych liberty – equality – fraternity.
Το εναντιούμενον τω δυναστεύοντι δήμος ωνόμασται.
That which is opposed to the tyrant has the name “demos” (people)
Thucydides, 460-394 B.C.
« Les tyrans ont toujours quelque ombre de vertu. Ils soutiennent les lois avant de les abattre. » Voltaire, Catilina, acte I, scène 5.
Français, nos frères !
Le 19 février 2013, votre président, François Hollande, s’est rendu dans notre capitale Athènes. « Notre message envers la Grèce est un message d’amitié profonde, de soutien, de confiance et de croissance » : voilà ce qu’a dit votre président. Avant d’appeler les entreprises françaises à investir… dans la terre et l’eau.
François Hollande et Antonis Samaras (Premier ministre grec) parlent « d’investissements » dans le domaine de la gestion des ressources en eau de la Grèce, ressources naturelles protégées par la Constitution grecque, qui n’appartiennent à personne d’entre nous, ni même au Premier ministre qui veut en faire commerce.
Nous connaissons très bien votre combat pour la protection des biens publics et sociaux et votre sensibilisation au sujet de la gestion de l’eau. Après des dizaines d’années de gestion privée de l’eau, et bien que Suez et Veolia, les deux grandes multinationales de l’eau, aient des intérêts français, les villes de Paris, Brest, Varages, Durance-Lubéron, Castres, Cherbourg, Toulouse et d’autres, se sont battues et ont obtenu que la gestion de l’eau redevienne publique. Ces villes ont agi ainsi après avoir vécu les conséquences de la commercialisation de l’eau, la montée vertigineuse des prix, l’accès inégal aux services hydrauliques, la baisse des investissements dans l’entretien du réseau, et les pratiques monopolistiques.
Même si en Grèce les citoyens ont oublié les temps lointains de 1925, quand l’eau d’Athènes était aux mains de l’entreprise américaine Ulen, nous les plus jeunes avons étudié et réfléchi à cette question, et nous partageons des inquiétudes similaires aux vôtres concernant la privatisation à venir des Compagnies des eaux ΕΥΑΘ et ΕΥΔΑΠ (compagnies de gestion de l’eau à Athènes et Thessalonique), et de nombreux autres services municipaux selon les bruits qui courent.
Notre inquiétude grandit et se transforme en colère quand nous lisons la réponse du commissaire européen Olli Rhen aux organisations de la société civile, qui confirme que la Commission européenne promeut à dessein la privatisation dans tous les pays qui bénéficient de plans de sauvetage. Bien que cela soit totalement contraire à la Directive de neutralité concernant la propriété ou la gestion privée ou publique des services de l’eau [1], mais aussi contraire au Protocole concernant les Services publics du Traité. Dans le même temps, la Commission et le gouvernement grec font semblant d’ignorer que la Commission elle-même effectue une recherche sur les pratiques monopolistiques de Suez, Veolia et Saur.
Dans notre pays qui se trouve au bord de la faillite et qui jour après jour perd une partie de sa souveraineté et de son indépendance, où les voix et protestations des citoyens contre le bradage colonialiste de ses ressources naturelles sont noyées sous le dogme de la « tolérance zéro », le gouvernement grec – qui a escamoté le vote des Grecs pour « renégocier » le mémorandum – considère qu’il est urgent de remplir ses caisses avec tout ce qui peut se vendre. Il semble qu’il vende non seulement son héritage, mais aussi une partie de son âme. Nous, les citoyens grecs, nous retournons, humiliés, aux temps du protectorat, obligés de privatiser notre eau – ce qui la rend chère et peu sûre.
Après l’impressionnant référendum italien pour l’eau, en 2011, le retour à la gestion publique dans de nombreuses villes françaises, la réglementation aux Pays-Bas en 2004 qui impose une gestion publique des services de l’eau, et la protection de l’eau par la constitution allemande, nous ne pouvons que nous demander : l’Union européenne nous considère-t-elle encore comme des Européens ? Et nous sommes tristes, justement parce que nous sommes Européens, non seulement pour nous, mais parce que nous allons devenir contre notre volonté le cheval de Troie de la marchandisation de l’eau partout en Europe. Nous savons que le peuple français ne s’enrichira pas de l’activité des multinationales françaises de l’eau, même si elle devait s’étendre jusqu’à la dernière de nos îles. C’est pourquoi nous vous invitons à vous tenir à nos côtés. Nous ne voulons pas de ces « investissements », qui signifient privatisation des gains et socialisation des coûts. Ce qui conduira notre pays à s’endetter jusqu’à la nuit des temps.
Nous voulons vous crier du fond de notre âme que la privatisation de l’eau, en Grèce, est une question qui concerne tous les Européens, qui depuis des années résistent vigoureusement à toute marchandisation des services de l’eau. C’est un pas en arrière dans notre combat pour les biens publics et pour la vie humaine. Pour nous tous, l’eau est plus qu’un bien commun, c’est le symbole de la justice et de la liberté, un héritage collectif que nous avons le devoir de protéger, pour le transmettre libre et sûr à la génération future.
En conclusion, le destin de la Grèce est aussi le destin de l’Europe. Une Europe qui se comporte en oligarchie anti-démocratique, installant une féodalité du XXIe siècle d’un nouveau genre, où la prise de décision est réservée aux lobbies.
Français, nos frères, nous les citoyens grecs, nous vous demandons d’être à nos côtés dans le combat que nous menons pour une gestion démocratique de nos ressources en eau, face à une troïka (FMI, Banque mondiale, Commission européenne, ndlr), qui décide et ordonne, et un gouvernement grec, qui n’est qu’aliéné, parfois de bon gré, aux directives du mémorandum. L’heure est venue que nous donnions ensemble un nouveau souffle à la devise liberté-égalité-fraternité.
Το εναντιούμενον τω δυναστεύοντι δήμος ωνόμασται. «
On appelle démos (le peuple), ceux qui s’opposent au tyran. »
Thucydide (460-394 av. J.-C.).
4 Comments
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De tout cœur avec vous. L’unité contre les diktats de l’Union Européenne est plus que jamais indispensable. Mettons cette Union ultralibérale à terre avant de construire une véritable Europe des peuples, démocratique et solidaire, bref à l’opposé de ce que nous connaissons actuellement.
Courage, la lutte pour un monde meilleur continue et doit s’intensifier.
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